scherzo transfiguro

par John Kerkhoven

Jeu
Office National du Film du Canada
Georges Schwizgebel
2006, 4 minutes, Canada

Jeu est visible sur le site web de l'ONF

l'orchestre s'accorde,
les chiffres du décompte s'enchaînent
chacun prennant la forme du prochain,
il y a une pause...

la musique éclate, le titre s'émiette
pour former les blocs d'un jeu de jeunes,
des blocs qui deviennent des points pointillistes,
jaune, orange, fond bleu, eau bleue,
ballons jaunes, poissons orange...

sur l'eau jouent les ombres de sportifs, huit,
ils se lancent des ballons autour d'un bassin,
bassin qui devient un cerf-volant,
leurs costumes changent de couleur,
bleu, bleu pâle, rouge et blanc...

ils sont nombreux maintenant parmi des arbres
qui se transmuent : sapins en cyprès,
cyprès en palmiers, de nouveau un bassin
devient un cerf-volant qui, tout au fond,
se transforme en bâtisse, au premier plan
un bonhomme court devant des bassins
qui apparaissent, l'un après l'autre,
entourés de lanceurs de ballons...

on passe à reculons à travers une fenêtre,
on se retrouve dans une pièce changeant
rapidement de forme, un ballet de murs,
de plantes, de marches, un bloc bleu, jaune
et rouge, tout bouge, une balle blanche
roule, dehors, les bonhommes jouent...

cette scène intérieure, y compris la vue
à l'extérieur, s'écrase, s'aplanit,
devient une toile sur un mur, abstraite,
géométrique, cette peinture devient ensuite
celle d'une guitare, et aussi vite,
c'est une toile verte et brune, à moitié
couverte de grandes et longues taches,
roses, orange brûlée et jaunes...

la peinture glisse à terre, elle grandit,
c'est un tapis, toute la salle d'exposition
est en mouvement : murs, plancher, toiles,
visiteurs, visiteuses, un couple vu de dos...

la scène de la galerie devient elle-même
une toile qui passe de mains en mains
dans une salle de spectacle où l'auditoire
se transforme, il devient elle, elle devient lui,
tout le monde change de place
bien que chacun reste assis...

il y a un homme debout qui joue du cor,
tout à coup une femme en robe bleue apparaît
debout les bras croisés, et voilà les musiciens
sur la scène, violons, flûtiste, hautboïste,
à chaque temps un autre changement :
elle, lui, lui, elle, violon, flûtiste, tromboniste,
un monsieur au violoncelle...

chorégraphie symphonique, le chef d'orchestre
devient pianiste, tout prend part au jeu,
musiciens, instruments, la foule dans la salle,
jusqu'à ce que ce scherzo de prokofiev
arrive à son crescendo
final, et que tout s'arrête.

on retourne vite, à l'envers, à travers
le concert, les peintures animées, les jeux
de plein air, jusqu'au début du film,
sauf que c'est la fin -

la fin de ce tourbillon majestueux
dans lequel des poissons orange
nagent autour d'une balle jaune
sur l'eau bleue, heureux dans le jeu.


Scherzo du Concerto pour Piano n.2 Opus 16 de Serge Prokofiev
Orchestre de la Suisse Romande
Direction : Philippe Béram
Soliste : Louis Schwizgebel-Wang

Merci à Emmanuelle Demange pour révisions, suggestions et conseils.

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